C’est maintenant fait. Même en Allemagne, il y a désormais deux droites. Alors que le tabou hérité du nazisme y est pourtant si fort, l’alliance scellée en Thuringe entre l’Afd, les Libéraux et une partie de la démocratie-chrétienne a donné à voir l’existence d’une droite qui accepte un rapprochement avec l’extrême-droite alors même que Mme Merkel et l’état-major de la CDU le jugent inacceptable.

Pour l’heure, c’est cette seconde droite qui l’a emporté. On revotera en Thuringe mais comment ne pas voir que la chancelière est partante, que la ministre dont elle avait fait son successeur a dû démissionner faute d’avoir pu contrôler la situation et que le débat ne fait que s’ouvrir ?

En Allemagne comme dans toute l’Europe et une grande partie du monde, un large pan de la droite bascule à l’extrême-droite ou devient l’extrême-droite et toute la donne politique de l’après-guerre en est bouleversée.

Marginalisé depuis la défaite nazie, le nationalisme opère un retour en force. Haine de l’autre qui n’a rien à voir avec cet amour de la patrie qu’est le patriotisme, il redessine désormais les échiquiers politiques et prend le pas sur les idées de multilatéralisme et de concertation internationale. Comme avant la Deuxième guerre mondiale, la force compte plus que la loi et l’on voit aussi bien M. Poutine procéder à une annexion territoriale en Europe, du jamais vu depuis 75 ans ; M. Xi installer des bases sur des îles contestées de la mer du Chine du Sud et M. Trump décider que des territoires occupés ne sont plus palestiniens mais israéliens.

Avec le retour du protectionnisme et la dénonciation des accords de désarmement légués par la Détente, les nationalismes alourdissent tant l’atmosphère que les Etats doivent revenir sur les mesures de réductions des dépenses militaires prises après la chute du mur. La possibilité de nouvelles guerres devient, en un mot, si réelle que la question est de savoir s’il est encore possible d’arrêter cette course à l’abîme.

La réponse est oui, mais à trois conditions.

La première est de ne plus sous-estimer le danger et d’admettre que rien, absolument rien, n’est aujourd’hui plus important que les moyens de le parer.

La deuxième est d’affirmer l’Union européenne en puissance politique, à même de peser sur la scène internationale et, si elle avait à le faire, de se défendre seule.

La troisième est de travailler, sans perdre un instant, à la nécessaire convergence des Verts, de la social-démocratie et des centre-droits autour de consensus européens fondés sur une relance des investissements permettant de financer la transition écologique, l’effort de réarmement et, par là même, la croissance nécessaire à l’arrêt du recul des classes moyennes.

Tout se tient. Sans relance, il n’y aura bientôt plus d’Union car les nationalistes l’emporteront et, sans Union, il n’y aura pas de paix mais la guerre.

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