L’Union prend les devants. La semaine dernière, le président du Conseil puis la Commission européenne ont publié, coup sur coup, des propositions de programme commun de l’Alliance atlantique dont les 27 chefs d’Etat et de gouvernement vont débattre, jeudi et vendredi, à Bruxelles.

Au Parlement, parallèlement, nous mettons la dernière main à un document encore plus fourni sur l’avenir des relations entre les deux premières puissances économiques du monde. Avant même que les grands électeurs américains n’aient proclamé la victoire de Joe Biden et plus d’un mois avant qu’il ne prenne ses fonctions ce sont ainsi les trois grandes institutions de l’Union qui auront énoncé leur vision d’une relance des relations transatlantiques.

Pour la première fois de son histoire, l’Union européenne n’attend pas que les Etats-Unis définissent leur position pour leur emboîter le pas, à l’habituelle exception de la France. Cela ne ressemble plus à ce qu’on avait connu jusqu’ici, plus du tout, mais où en est-on ?

Pas encore, et tant s’en faut, aux Etats-Unis d’Europe car les Européens, premier point, n’ont pas même ébauché une redéfinition de l’Alliance pourtant tellement nécessaire à sa pérennité. Ils ne l’ont pas fait car la différence reste grande entre ceux qui craignent d’accélérer le retrait américain du vieux continent en affirmant trop vite l’Union en acteur de la scène internationale, ceux qui voudraient, au contraire, presser le pas vers une souveraineté européenne fondée sur une défense commune et ceux, enfin, les plus nombreux, qui, hésitent entre toutes les nuances de l’allegro ma non troppo.

Les 27, c’est un fait, n’ont toujours pas de position commune sur ce qui est, pourtant, l’essentiel. Ils se sont donc prudemment contentés de formuler ce qui pose le moins de problèmes, aussi bien entre eux qu’avec les Américains. C’est en cela qu’on est encore si loin d’une vraie révolution mais on ne peut pourtant pas dire, deuxième point, que des dossiers comme ceux de la lutte contre le réchauffement climatique, des relations avec la Chine ou des nouvelles technologies soient choses négligeables.

A défaut d’être unie sur la si difficile question de sa souveraineté, l’Union propose aux Etats-Unis d’agir de concert sur le rapport de forces entre la Chine et les démocraties occidentales, autrement dit sur ce qui fera ce siècle. Elle le fait avec pragmatisme mais en se posant clairement, troisième point, dans cette position de partenaire égal des Américains qu’elle finira par occuper le jour où les deux puissances atlantiques auront eu, sous deux décennies au plus tard, à se répartir les rôles dans le maintien de la stabilité internationale.

C’est à l’ébauche d’une révolution qu’on assiste, aux premiers infléchissements d’un grand tournant rendu inévitable par l’émergence de la Chine, la réorientation asiatique des Etats-Unis et les quatre années du mandat qui s’achève à Washington. Sans Donald Trump, sans le doute dont il a entaché le parapluie étasunien et sans le projecteur qu’il a braqué sur les faiblesses de la démocratie américaine, les Européens n’en seraient pas arrivés là où ils en sont : aux prémices d’une puissance politique.

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