Mario Macron ou Emmanuel Draghi, c’est comme on veut, comme ils voudront, mais ces deux-là doivent d’urgence faire front et se doter d’un programme commun car, maintenant qu’elle est gagnée, la bataille commence.

La bataille de l’unité européenne vient d’être remportée là où elle avait commencé en 1957, à Rome, où la Lega de Matteo Salvini est entrée dans un gouvernement dont le président, Mario Draghi, souhaite aller vers une Union « de plus en plus intégrée » et dotée d’un « budget public commun ».

Corde au cou et robe de bure, Matteo Salvini s’est converti à l’ambition fédéraliste après que le Rassemblement National de Marine Le Pen a lui aussi cessé de parler de sortir de la « prison des peuples » que l’Union européenne constituait à ses yeux.  Il ne reste ainsi plus aucune grande formation de l’Europe des 27 pour contester la marche vers l’unité européenne et ce n’est pas tout. Les Etats-Unis viennent parallèlement d’accepter une invitation de l’Union à se joindre à une reprise de pourparlers avec l’Iran sur la question nucléaire. C’est comme si l’on anticipait là ce que pourrait être, demain, une nouvelle alliance des démocraties dans laquelle l’Union serait à la manœuvre dans ses marches africaine et proche-orientale tandis que les Etats-Unis confirmeraient leur priorité asiatique L’Union, c’est une première, s’est affirmée jeudi en acteur de la scène internationale et cela juste après qu’Emmanuel Macron et Angela Merkel se soient attachés à faire avancer les projets de chars et avions de combat européens. Bien que Joe Biden ait réaffirmé l’engagement des Etats-Unis à défendre le vieux continent, l’idée de Défense commune européenne continue de progresser. Le concept « d’autonomie stratégique » devient incontournable. Personne en Europe, aucun pays, aucun parti, n’ irait refuser les bénéfices du plan de relance commun et, bien ou mal mais certainement mieux que si cela n’avait pas été le cas, l’Union a pris en mains la lutte contre la pandémie alors même que les traités ne lui confèrent pas de compétences en matière de santé.

Oui, tout dit aujourd’hui, que la bataille est gagnée mais pourquoi ne fait-elle alors que commencer ?

C’est qu’autour de nous, tout va très vite.

La Chine se hâte de multiplier les faits accomplis en mer de Chine méridionale et à Hong Kong. La Chine consolide son rapport de force tandis que les Etats-Unis vont injecter 1900 milliards de dollars dans leur économie alors que nous autres Européens n’espérons pas débloquer avant plusieurs mois un seul centime de notre plan de relance dont on sait pourtant qu’il faudrait le doubler. Une crise sociale et politique peut éclater avant que les effets de la relance commune ne se fassent sentir et, si vite que nous ayons avancé, nous marchons bien plus lentement qu’il ne le faudrait.

Parce que nous pouvons décrocher et même dévisser, il nous faut accélérer, bousculer les plus frileux et ne surtout pas devoir attendre que l’Allemagne se soit donnée, en septembre prochain, une nouvelle majorité et un nouveau chancelier.

Il faut pour cela que les deux dirigeants de l’Union qui ont en commun le plus d’audace et d’ambitions européennes appellent sans plus attendre à la mobilisation générale. Ensemble, Mario Draghi et Emmanuel Macron doivent travailler à une proposition pour l’Europe qui, dans la lignée du New Deal, allie d’amples investissements collectifs à de nouvelles protections sociales – celles que demande, en l’occurrence, le développement de la précarité de l’emploi.

C’est ce que Joe Biden se prépare à tenter aux Etats-Unis. C’est ce que Mario Macron et Emmanuel Draghi doivent impulser ensemble mais c’est à l’Italie de tirer la première parce qu’il serait contreproductif que la France semble s’éloigner de l’Allemagne en lui opposant un front italo-français.

C’est à l’ancien banquier central de l’Union, à l’homme qui avait sauvé l’euro en 2008, de mettre sur la table les premiers éléments d’un nouveau plan pour l’Europe que la France pourrait ensuite contribuer à enrichir. Ce plan serait ainsi déjà prêt au lendemain des élections allemandes. L’Allemagne aurait déjà eu le temps de s’y habituer et d’autres des Etats membres de s’y rallier. 

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