Côté face, les sept plus riches des grandes démocraties haussent le ton. Côté face, le G7 a emboîté le pas, dimanche, à Joe Biden en mettant en garde Vladimir Poutine contre les « conséquences massives » qu’aurait une invasion russe de l’Ukraine mais, côté pile, une négociation s’amorce ou se cherche en tout cas.

Côté pile, la secrétaire d’Etat adjointe en charge de l’Europe, Karen Donfried, sera cette semaine à Kiev, Moscou et Bruxelles après que le président américain eut appelé, la semaine dernière, l’Alliance atlantique à prendre en considération les « préoccupations de sécurité » de la Russie. Sibyllin, cet appel avait fait suite à l’entretien de Joe Biden avec le président russe qui a publiquement demandé aux Etats-Unis des « garanties juridiques » propres à écarter toute entrée de l’Ukraine dans l’Alliance atlantique.

Ces garanties, les Américains ne peuvent pas les lui donner et ne le feront pas puisqu’ils ne peuvent pas décider seuls au nom de toute l’Alliance et peuvent encore moins renoncer à une candidature ukrainienne en lieu et place de l’Ukraine. Formellement parlant, Vladimir Poutine a mis la barre trop haut mais, sur le fond, il peut faire valoir qu’autant l’Ukraine est libre de choisir ses alliances, autant il se doit, lui, de défendre la sécurité de la Russie en s’opposant à ce qu’une Alliance dominée par les Etats-Unis s’avance jusqu’à ses frontières.

L’argument est fort car si la Confédération helvétique en venait, par exemple, à décider de rejoindre une alliance pilotée par la Chine, on imagine mal que l’Union européenne reste passive devant ce qui serait pourtant un choix libre et souverain des Suisses.

Joe Biden n’a ainsi pas tort de souhaiter que l’Alliance atlantique n’ignore pas les inquiétudes russes. Il n’y a là que logique et bon sens mais alors quoi ?

Eh bien il faut alors dire à M. Poutine que nous ne pouvons pas entendre ce qu’il nous dit si lui n’entend pas que les Démocraties n’ont pas annexé un seul mètre carré du territoire russe mais qu’il a, lui, annexé la Crimée et mis la main sur l’Ukraine orientale. Il faut dire au président russe que les frontières occidentales de l’Ukraine et du Bélarus sont les frontières orientales de l’Union européenne et que nous sommes donc fondés à nous inquiéter de ses mobilisations de troupes et de son agressivité en plein cœur du continent.

Vous vous sentez encerclés, M. Poutine, mais outre que le plus étendu des pays du monde l’est inévitablement par sa seule géographie, nous n’avons nous non plus aucune raison d’être tranquilles car c’est aux frontières de l’Ukraine et au Belarus et non pas à celles de la Russie qu’une puissante armée montre ses muscles.

Alors disons les choses. Si vous ne voulez pas, M. Poutine, que l’Alliance atlantique puisse s’étendre jusqu’à vos frontières, quelles garanties de non-agression de vos voisins, de non-ingérence dans leurs affaires intérieures et de retrait des territoires occupés d’Ukraine orientale et de Géorgie êtes-vous prêts à donner, vous, à ces pays et à l’Union européenne au-delà d’eux ?

Vous êtes en droit de demander que votre sécurité soit assurée mais l’Ukraine, la Géorgie, les Bélarusses et nous-mêmes le sommes aussi et bien plus que vous car l’Union européenne et l’Alliance atlantique respectent les frontières nationales du continent Europe alors que vous ne le faîtes pas et ne manifestez pas la moindre intention de le faire.

Une négociation se cherche, M. Poutine. C’est tant mieux car il est largement temps de dépasser nos erreurs historiques et nos torts communs mais n’attendez pas que nous nous comportions en coupables alors qu’en l’occurrence, l’agression n’est pas nôtre fait mais le vôtre.

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