Il n’y a pas que Budapest. La capitale hongroise est passée dimanche à l’opposition mais, ce 13 octobre, Viktor Orbán a également perdu dans dix autres des vingt-trois villes de plus de quarante mille habitants tandis que, largement vainqueurs à la Chambre basse, les conservateurs polonais du Parti droit et justice n’en perdaient pas moins le Sénat.

Pour les nouvelles droites de la droite polonaise et hongroise ce ne fut pas la débâcle et loin de là mais les revers qu’elles viennent d’essuyer sont pourtant spectaculaires car ce sont des pouvoirs en plein contrôle de l’audiovisuel et assis, surtout, sur des économies en pleine croissance qui ont été ainsi ébranlés.

L’opposition et la société civile sont autrement plus vivantes, fortes et déterminées à Varsovie qu’à Budapest. La Pologne n’est pas la Hongrie mais, si différents que soient ces pays, il y a trois mêmes leçons à tirer de ces scrutins législatif et municipal.

La première est qu’ils ont confirmé un phénomène international. Comme en Russie et en Turquie ces dernières semaines, les villes et la jeunesse polonaises et hongroises ont récusé et humilié des pouvoirs autoritaires, nationalistes et réactionnaires auxquels les campagnes, les petites villes et les plus âgés continuent d’accorder leurs voix. D’Ankara à Varsovie, c’est tout le continent Europe qui est désormais divisé en deux mondes, rural et urbain, vieux et jeune, qui votent l’un pour l’unité européenne, l’évolution des mœurs et la mondialisation de l’économie pendant que l’autre se tourne vers un retour aux valeurs traditionnelles, la nostalgie de temps passés et le refus du libre-échange.

MM. Poutine et Kaczyński, Orbán et Erdoğan perdent les nouvelles générations et les villes, le pays utile et créateur de richesses, et cela signifie que leur temps s’achève, pour l’instant lentement mais peut-être, à terme, beaucoup plus vite qu’on ne peut encore l’imaginer.

La deuxième leçon de ce 13 octobre est que les points marqués par les oppositions polonaise et hongroise l’ont été grâce à des fronts communs contre l’autoritarisme. Centriste ou de gauche, les différentes forces l’opposition polonaise s’étaient résolues à n’opposer, dans chaque circonscription, qu’un seul candidat sénateur à celui du pouvoir. En Hongrie, c’est un front allant de la gauche à une extrême-droite recentrée qui a attribué Budapest et ces dix autres villes à l’opposition.

Alliées, les forces anti-autoritaires sont plus décisives que les nationalismes en place. Elles sont virtuellement majoritaires et pourraient faire tomber le PiS et le Fidesz mais ce qui est possible pour le Sénat polonais et les municipalités hongroises ne l’est pas, ou pas encore, pour des scrutins débouchant directement sur l’exercice du pouvoir car les oppositions à l’autoritarisme n’ont pas aujourd’hui de programme commun.

La gauche et les libéraux, ce n’est pas la même chose. Même recentrées, les extrêmes-droites restent, et heureusement, des repoussoirs sitôt qu’elles se présentent sous leurs propres couleurs. Face aux autoritarismes nationalistes, la grande convergence des démocrates de ce début de siècle reste à inventer.

C’est la troisième leçon de ce dimanche, la moins souriante, mais MM. Poutine et Kaczyński, Orbán et Erdoğan apparaissaient hier encore si totalement inamovibles qu’on aurait tort de bouder sa joie. Les illibéraux s’avèrent fragiles.

A la liberté de reprendre muscle et neurones.                      

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